[INTERVIEW] Oscar Anton « Je pense avoir été tellement frustré de ne pas pouvoir sortir de musique pendant ces quelques années que j’avais besoin de faire l’inverse »

L’artiste français Oscar Anton s’est lancé dans un projet fou cette année, en décidant de créer et de partager de la musique chaque mois. Le concept ? Dévoiler trois titres inédits dont un bonus entre le mois de janvier et le mois de décembre 2020. Nous avions donc rendez-vous sur toutes les plateformes et sur les réseaux sociaux d’Oscar tous les derniers vendredis du mois pendant douze mois pour découvrir ses titres, de la manière la plus spontanée qu’il soit. Home of Sanity, c’est le nom de ce projet qui nous a accompagné pendant cette folle année, durant laquelle la musique était une chose, ou que dis-je, un art indispensable. Rencontre avec Oscar Anton, et retour sur son parcours.

Salut Oscar, peux-tu te présenter à ceux qui ne te connaissent pas (encore) ?

Salut ! Je m’appelle Oscar, j’ai 24 ans et je fais de la musique. Je fais à peu près tout depuis mon studio (qui est aussi ma chambre btw), de la composition à l’enregistrement, production et création des visuels. Le confinement fait partie de ma vie depuis un petit moment finalement.

On dit que nos goûts musicaux sont parfois le reflet de ce que nous écoutions plus jeunes. Quel est ton rapport à la musique et comment penses-tu que ton entourage a pu t’influencer musicalement parlant ?

Yes c’est certain ! J’ai grandis en écoutant les disques de mes parents. C’était surtout de la musique internationale, genre Bob Marley, Robbie Williams, U2, Coldplay, James Morrison. On ne regardait pas beaucoup la télé mais on écoutait beaucoup de musique à la maison. J’ai toujours été fasciné par les émotions que pouvaient transmettre les mélodies, sans même comprendre un mot j’avais l’impression qu’on me racontait une histoire. Hyper naturellement j’ai voulu en raconter moi aussi par la suite.

Avec du recul et de l’expérience, comment est-ce que tu caractérises ta propre musique ?

Je crois que je fais de la pop au sens très, très large haha. J’essaye de ne me limiter à rien, je pense que j’ai tellement à apprendre et à découvrir que je ne vois aucun interêt à me cantonner à un style en particulier. Cette année, j’ai été inspiré par du jazz, de la bossa- nova, de l’électro, de la soul et cinquante autres sous genres. Tant que la chanson me touche j’en suis fier, peu importe l’orientation artistique de celle-ci.

Après avoir été signé pendant trois ans chez Polydor, tu as décidé de te lancer en indé. Pourquoi avoir fait ce choix ?

Encore une fois, je pense tirer un vrai apprentissage de ces trois années. J’ai signé en label à 19 ans, avec quelques chansons seulement dans mon ordinateur. Je pensais qu’avec des équipes et une organisation, tout irait beaucoup plus vite ; ça a été le contraire. Les grosses maisons de disques ont beaucoup d’artistes, énormément de projets à gérer et lorsqu’on arrive, on n’est pas la priorité. Il fallait toujours attendre quelqu’un, quelque-chose, le bon moment… Je voulais apprendre, composer, me tromper, avancer, mais je n’avais pas cette liberté. J’ai donc décidé de quitter le label, et de tout gérer seul. Cette fois-ci, succès comme échecs, je serais seul responsable.
Enfin, au delà de cet aspect organisationnel, je n’étais pas du tout d’accord avec la stratégie du label, pour moi en retard sur la consommation de musique actuelle. Ma génération et de plus en plus celle de nos parents, a adopté la digitalisation. On écoute notre musique sur les plateformes de streaming, réseaux-sociaux… et la stratégie doit se faire dans ce sens. Les statistiques d’écoute sont disponibles en temps réel et impliquent des décisions ultra rapides, difficiles pour d’anciens modèles.

Tout ça pour dire que maintenant, je fais un peu ce que je veux… haha.

Penses-tu alors que le fait d’être dans une Major peut « imposer » des limites dans un processus de création ?

Ça dépend évidemment du label, certains l’ont très bien compris mais d’autres peinent encore, surtout en France.
En tant qu’artistes, nous ne sommes plus limités au format d’album ou EP pour sortir notre musique, le streaming nous permet par exemple de sortir des titres quand on veut, sous n’importe quelle forme. Et je pense que de la même manière le public est en train de changer sa façon d’écouter et suivre les artistes. Lorsqu’on me demandait de patienter six mois avant de sortir un nouveau titre pour que les radios aient le temps de le diffuser, j’ai sorti trois titres par mois sur toute l’année 2020. Grâce à ça, j’ai multiplié par 70 mon nombre d’auditeurs mensuels sur Spotify (eheh).

Tu t’es donc lancé un challenge cette année : celui de sortir un pack de trois titres dont un bonus tous les mois. Peux-tu nous parler de ce projet ? Comment est-ce que cette idée t’est venue ?

Je me suis lancé dans ce projet en sortant du label justement. Je me suis dis « quelle est la façon la plus spontanée de sortir ta musique, et qui te poussera à découvrir un maximum de choses ? ». Projet hyper dur, tellement de travail et très peu de sommeil mais fier de l’avoir accompli jusqu’au bout. Je pense avoir été tellement frustré de ne pas pouvoir sortir de musique pendant ces quelques années que j’avais besoin de faire l’inverse, de tout donner chaque mois, seul, depuis ma chambre.

Sur certains titres (Nuits d’été et Reflet), on peut d’ailleurs entendre ta soeur, Clémentine. Pourquoi était-ce important qu’elle chante avec toi ?

Ça s’est fait vraiment naturellement. Je ne savais pas qu’elle voulait chanter jusqu’au début de cette année, où elle m’a envoyé un mémo vocal avec le début d’une chanson. Avec le confinement, on s’est retrouvés chez nos parents et avons terminé le titre. Comme j’étais en plein dans mes sorties chaque mois, ça nous faisait une super excuse pour sortir le titre sur un des packs. Voilà, c’est tout haha, on voulait que ça soit le plus spontané possible. Je suis hyper content de ces chansons, Clémentine compose des choses magnifiques et tellement différentes de ce que j’ai l’habitude de faire. Ça me permet de me mettre un peu en arrière, et d’essayer d’être au plus proche de ses goûts et sa vision des chansons, c’est cool !

Tu as également fait un feat avec Esken (L’Ange passe), qui est un peu plus sombre si je peux me permettre. Peux-tu nous parler de cette collaboration ?

Haha tu peux te permettre. Je voulais vraiment faire une collab’ avec un rappeur cette année, encore une fois pour essayer quelque-chose de nouveau. J’ai composé cette chanson sans vraiment savoir comment l’aborder, et j’ai entendu les titres d’Arthur (Esken) quelques temps après. J’ai trouvé ses textes, sa façon de poser ses mots et sa voix vraiment singulière, je lui ai envoyé le titre et ça a donné L’ange passe. On s’est retrouvés en studio (dans la chambre d’un pote) ensuite pour la terminer. C’est un mec super cool et vraiment talentueux. Je crois qu’il sort un titre par mois cette année donc force à lui, il le mérite !!

J’ai pu lire que la musique était le vecteur de toutes tes émotions. Comment te sens-tu justement face à la crise que nous vivons depuis un an ?

Comme tout le monde je pense, il n’y a pas de bonne façon de l’aborder. Je pense qu’on fait comme on peut, on essaye de trouver refuge dans ce qui passionne, ceux qu’on aime. C’est comme si le temps était un peu mis sur pause, donc autant le voir comme une opportunité de rectifier deux / trois trucs, changer de trajectoire si besoin. La solidarité se fait sentir je trouve, et ça c’est chouette.

Pour conclure et en espérant que la situation évolue dans les prochains mois, quelles sont tes espérances, tes attentes, tes objectifs concernant ta musique et à la vie post- covid ?

Hahaha tu sais quoi, je n’en sais rien et on verra bien. Le seul objectif est de rester aussi spontané car c’est comme ça que je me sens le mieux. Ce qui est certain, c’est que je vais continuer à faire et sortir de la musique autant que possible car c’est ce que j’aime le plus. J’ai quelques objectifs en tête hein, bien sûr, mais je les garde pour moi haha.

Merci les gars, à très vite !

Merci à Oscar et à Camille (La Mission) pour le temps consacré à cette interview

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