[INTERVIEW] Gabi Hartmann sort son premier album éponyme. Rencontre avec une artiste qui remet le jazz au goût du jour

Alors que nous vivons à une époque où nous n'avons que les mots "pop" et "musique urbaine" à la bouche, certain.es artistes puisent dans diverses influences pour créer une musique qui les démarquent des autres.
Après avoir avoir énormément voyagé et fait une multitude de rencontres qui l'inspireront pour écrire et composer sa musique, Gabi Hartmann nous livre un premier album éponyme.
Elle casse les codes.
Mélangeant pop, variété, jazz, bossanova et musique du monde, Gabi Hartmann nous offre un disque de quatorze titres, nous emmenant alors en voyage durant sa lecture. Rencontre avec une artiste globetrotteuse à la soif de rencontres, qui remet le jazz au goût du jour. 

C’est l’heure de l’interview.

Musicaléomentvotre : Salut Gabi, comment est-ce que tu vas ?
Gabi Hartmann : Ça va ! C’est beaucoup de boulot en ce moment avec la sortie de l’album mais je suis contente qu’il soit sorti. On fait beaucoup de promo mais ça va. On a fait un gros concert mardi (ndlr : 24 janvier) à La Seine Musicale, il y avait 950 personnes, c’était énorme ! Je redescends petit à petit.

M : Je n’ai pas pu assister au concert mais on en reparlera ! Est-ce que tu peux te présenter à ceux qui nous lisent et ne te connaissent pas encore ?
G.H : Oui alors, je suis née à Paris, je chante et j’écris des chansons. Je suis autrice, compositrice, musicienne, chanteuse. Je viens de sortir mon premier album le 13 janvier.

M : On va revenir un petit peu sur ton parcours. A titre personnel, je caractérise ta musique comme étant une sorte de beau mélange entre de la chanson, du jazz, un peu de bossanova et plein d’influences différentes. Je voulais savoir comment est-ce que toi tu t’es dit « j’ai envie de faire de la musique ma vie ».
G.H : C’était une passion depuis toute petite, j’ai toujours vibré énormément avec la musique. C’est un art qui m’a toujours touché sans explications, il n’y a pas un élément déclencheur ; mon père m’a poussé à faire du piano classique, j’aimais chanter. Ça a vraiment commencé au lycée, en enregistrant les premières maquettes, en composant avec des copains du lycée en jouant et en faisant des reprises. Puis je suis allée au conservatoire, j’ai étudié le jazz et la guitare… et j’ai appris la musique dans mes voyages, notamment au Brésil où j’ai vécu.

M : Est-ce que le fait de partir vivre à l’étranger t’a aussi donné l’envie de chanter dans différentes langues ?
G.H : Je chantais déjà en anglais et en français. Je pense que dans le jazz, c’est très commun de chanter dans plusieurs langues, comparé à la chanson, et les artistes jazz que j’écoute le font, d’ailleurs. J’ai voulu casser les codes avec cet album, en faisant des chansons sans m’empêcher de chanter dans plusieurs langues. J’ai voulu casser les codes des genres.

: Tu disais que tu écoutais certains artistes qui mélangeaient les langues. Quels sont ceux qui t’inspirent ?
G.H : Je pense à Rodrigo Amarente qui est brésilien, à Melody Gardot qui m’a beaucoup influencée, Henri Salvador qui chante en créole et en français… il y a beaucoup d’artistes, mais je dirais que ce sont eux principalement qui m’inspirent.

M : J’aime beaucoup aussi ces artistes car j’ai l’impression de voyager avec eux !
G.H : Tout à fait.

M : Et penses-tu qu’il est nécessaire de voyager, notamment pour écrire et être inspirée ?
G.H : Oui, je pense que c’est très important ! Ça me donne de nouvelles inspirations à chaque fois que je voyage, que je fais des nouvelles rencontres. Je vois des choses qui me marquent plus que si tu restes dans tes habitudes.

M : En 2021 tu sortais un premier EP, Always Seem To Get Things Wrong. Est-ce que tu peux nous en parler un peu ?
G.H : Il s’est fait avant le Covid. Certaines chansons ont été enregistrées à Rio, d’autres à New-York. Je l’ai réalisé avec Jesse Harris, c’est assez fou. L’album est en fait une continuité de l’EP, ce dernier était un premier pas car je savais que j’allais faire l’album après. Et je chantais déjà en anglais, français et portugais !

M : Concernant l’EP, comment tu as vécu cette période où tout s’est arrêté ? Tu en as profité pour écrire les chansons qu’on retrouve dans ton album ?
G.H : J’ai beaucoup écris de nouvelles chansons, fait des reprises que j’adore, brésiliennes surtout. J’ai beaucoup réfléchis à ce que je voulais faire pour l’album, de quoi je voulais parler, qui je voulais avoir dans l’album. Il y a eu des périodes très difficiles et d’autres incroyables, c’était deux extrêmes. C’était long, certaines périodes où des gens sont décédés ont été horribles, et puis parfois il y avait des périodes de joie intense.
Avec les musiciens on se retrouvait tout le temps pour faire des jams, c’était beau. On était très proches avec un groupe d’amis donc on se voyait tout le temps, vu qu’on était dans la même situation.

M : Revenons-en à Gabi Hartmann, ton album. Comment as-tuprocédé pour l’écrire, comment tu t’es entourée ?
G.H : Il y a eu Jesse Harris à la réalisation, Félix Remy qui a enregistré et mixé beaucoup de morceaux, donc on a passé pas-mal de temps en studio, notamment pour trouver un son à cet album. Les chansons se sont faites au fil des années, j’ai voulu mettre toutes celles que je préférais dans le disque ! Des récentes que je n’avais jamais joué, et d’autres plus anciennes. Ça s’est donc fait au fil des années et des rencontres. Puis l’album s’est fait principalement entre Paris (au studio Pigalle) avec mes musiciens de Paris et entre New-York avec les musiciens new-yorkais avec qui Jesse travaille tout le temps.

M : Ce qui t’apporte aussi plein d’influences différentes des deux villes.
G.H : C’est ça !

M : On retrouve aussi dans cet album deux duos, l’un avec Julian Lage et Ghandi Adam.
G.H : Julian est un ami de Jesse, avec qui il a travaillé et c’est un grand guitariste de jazz. Et, j’ai rencontré Ghandi à Paris il y a quelques années, qui est un super flutiste.

M : Ce sont vraiment des beaux morceaux ! People Telle Me a d’ailleurs un clip. À travers ces derniers issus de l’album, on retrouve une ambiance très « rétro » ; pourquoi faire ce choix ?
G.H : On retrouve dans le clip de People Tell Me une référence aux années folles, l’époque des artistes surréalistes, l’époque de la naissance du jazz. C’était très important dans la société, dans les soirées et les bals. J’ai cherché dans cet album à faire ressortir un côté « nostalgique » de cette époque, puisque ce sont aussi les disques qui m’influencent le plus, les années 60 et 70 ; je pense notamment à Kita Novelle. C’est aussi une sorte d’hommage à cette époque, tout en le rendant actuel.

M : Tu disais en début d’interview que tu avais pu présenter ton album à La Seine Musicale… je n’y étais pas malheureusement, mais comment ça s’est passé ?
G.H : Ah ! On était six sur scène : guitare, piano, percussion, contrebasse puis les instruments à vent. On a passé trois jours à répéter ensemble, il y avait vraiment une belle énergie entre nous lorsqu’on répétait les morceaux qu’on n’avait jamais joué sur scène, c’était fort.

: Ça devait être impressionnant !
G.H : Ça va ! On a fait un gros festival de jazz pendant l’été et j’ai fait des premières parties à la Salle Pleyel et ça… c’était vraiment quelque-chose.

M : Et tu as donc joué devant 950 personnes… à une époque où le jazz n’est pas forcément le genre qu’on entend le plus ! Comment tu vois toi, artiste qui souhaite remettre le jazz au goût du jour, cet aspect-là de l’industrie musicale ?
G.H : J’ai envie de montrer dans cette industrie qu’on peut faire de la musique et ne pas être exclue d’une « case ». Là moi, je veux faire de la chanson, mais dans celle-ci il y a des influences diverses, dont le jazz et d’autres choses. J’aime pouvoir dire que je fais du jazz ET de la variété ; on peut très bien faire de la chanson, de la pop, tout en ayant les influences qu’on veut. L’appellation « pop » est très récente ! En France, la pop est très fermée à un certain style, il faut chanter de telle ou telle manière… alors qu’il faut simplement s’ouvrir à diverses influences. Mais ça bouge !

M : C’est grâce à des artistes comme toi qui osent briser les codes.
G.H : *rires* Et il en faut de plus en plus !

M : Pour 2023, est-ce que tu as déjà des choses de prévues ?
G.H : Je vais être aux Francofolies de La Rochelle le 14 juillet, je suis super contente. Et il y aura une date à Paris, le 27 novembre à La Cigale.

M : Et, qu’est-ce qu’on pourrait te souhaiter pour la suite ?
G.H : *rires* Euh… j’espère continuer à faire de beaux albums ! J’espère que différentes générations viendront me voir en concert ; la majorité des gens qui viennent sont un peu âgés et moi je veux essayer de casser ça, de jouer dans des salles pour toutes les générations.

M : Je ne doute pas sur le fait que tu vas réussir.
G.H : Merci merci merci !

Gabi Hartmann est disponible sur toutes les plateformes depuis le 13 janvier.
En concert à La Cigale le 27 novembre.

[ALBUM] Armée de son indétrônable plume, Zazie sort un nouvel album engagé, « Aile-P »

On ne la présente plus.

Zazie : une des chanteuses françaises les plus admirées, qui compte désormais onze albums studio à son actif et trois albums live. Zazie, c’est des textes écrits pour elle-même, d’autres écrits pour Pascal Obispo, Johnny Hallyday ou encore Jane Birkin. Zazie, c’est des récompenses au fur et à mesure des années au sein des Victoires de La Musique ou des NRJ Music Awards (pour ne citer qu’eux).

Zazie aujourd’hui, c’est un retour en musique avec Aile-P : un album fort, brut et chanté sans prendre de pincettes.

Il ne nous aura fallut que d’une seule écoute pour reconnaitre que cet album était d’une parfaite réalisation. Aile-P est un disque composé de huit titres pour une durée totale de vingt-sept minutes. À travers ces derniers, Zazie (re)pose sa voix sur un fond de piano tout en ajoutant une pincée d’influences électroniques. Sous ces airs de musique pop très moderne, l’auteure-compositrice-interprète se livre plus que jamais dans cet opus, sans détour. La musique est puissante, les thèmes abordés sont forts et la façon dont ils sont chantés est des plus brute.

Aile-P est probablement l’album dans lequel Zazie se sera le plus livrée en tant qu’artiste actuelle, dans ce monde-ci. Elle n’hésite pas à le crier dans Ça commence, titre d’ouverture et à se lâcher dans Gilles, comme on aimerait bien tous le faire à certains moments – il faut l’avouer. Si Zazie met à plat les choses qui vont mal, on a néanmoins su reconnaitre une envie imminente de donner de l’espoir à quiconque écoutera ce disque. C’est le cas dans Gravité, qui tente de nous faire comprendre que malgré tout, rien n’est grave ; ou dans Let It Shine et Lève-Toi, deux titres qui donnent envie de foncer tête baissée vers un avenir meilleur, de plus beaux jours.

Aile-P est un disque où Zazie allie sa voix presque brisée à une plume indétrônable et des plus engagée.

Entre jeux de mots indéfectibles, musique brute et textes poignants, Zazie nous livre un album magistral sur l’état du monde. Et il ne nous en faut pas plus pour être conquis.

Aile-P, le nouvel album de Zazie est désormais disponible sur toutes les plateformes.
À retrouver en live le 13 octobre 2023, au Zénith de Paris.