



Sam Sauvage c’est : un artiste qui porte le costard comme personne, une allure, un poète des temps modernes qui pioche tant dans la poésie que dans des rythmiques électro-pop et des influences rock. C’est un roi du dancing, un de ces artistes qui parlent de nos vies « basiques » mais en les chantant d’une manière telle qu’on y prêterait presque plus d’attention. C’est une de ces pépites qui ne fait que parler de lui à base de phrasés et de pas de bourrés à la singularité magnétique et hypnotisante. Un lundi, lendemain d’un concert à La Maroquinerie, nous nous sommes retrouvés dans l’open-space de son label pour parler musique, mais aussi de jeunesse désabusée, de Boulogne-sur-Mer et des lueurs d’espoir qui se glissent dans son nouvel EP, ‘Sam Sauvage‘.
Rencontre avec Sam Sauvage.

Musicaléomentvotre : Tu viens de sortir ton second EP, ‘Sam Sauvage‘, le premier datant de 2023. Comment tu te sens?
Sam Sauvage : Et bien je suis très content! L’EP précédent était un peu l’EP 0, d’où le nom ‘Prémices’ car je n’étais pas sûr de ce que je faisais – ce qui est un peu bête quand on sort un projet mais c’était une première étape. ‘Sam Sauvage’ est finalement l’EP 1 et j’ai l’impression d’avoir sorti un vrai projet que je peux défendre.
Un EP qui a pas mal d’influences d’ailleurs : du texte, de la musique électronique, une voix qui peut faire penser à du Baschung ou à Arthur Teboul (Feu ! Chatterton)… Est-ce que tu peux nous parler de ton parcours?
J’ai essayé la guitare une première fois à six ans mais ça ne s’est pas très bien passé… Le solfège m’ennuyait *rires* donc j’ai arrêté et j’ai repris à quinze ans grâce à une vidéo de Bob Dylan. À cette époque j’étais, comme plein d’adolescents, en recherche d’identité et d’un moyen pour me frayer une place ; je trouvais que celle de musicien était cool. Je n’ai pas fait de la musique que pour la musique au début, mais aussi pour tout ce que ça engendrait derrière : se libérer dans le style et aussi dans la façon d’être. Je me suis mis à découvrir Bob Dylan, Baschung, Gainsbourg, La Grande Sophie ou encore M. Pokora et je me suis fait un peu tout seul pour découvrir de nouvelles choses. Ce qui est bien avec notre génération, c’est qu’on a facilement accès à tout et c’est comme ça que j’ai fait mon chemin.
Et justement, comment est-ce qu’on en arrive à ce nom, Sam Sauvage?
J’assume désormais cette histoire *rires*, mais cela est dû à ma toute première soirée, à quatorze ans, avec de la Heineken que mes potes buvaient pour faire « les grands ». Et moi je n’en ai pas bu donc je suis devenu le Sam – ce qui m’a suivi pendant un certain temps, jusqu’à ce que j’arrive à la FAC, où je me suis présenté en tant que ‘Sam’ alors que je m’appelle Hugo. Et puis ‘Sauvage’ à côté puisqu’il fallait trouver un nom de scène qui faisait écho à plein de choses que j’aimais bien.
Ce côté sauvage se ressent bien dans tes projets, notamment dans tes textes très forts. J’ai personnellement adoré ‘Ali roule de nuit‘ et ‘Les âmes sensibles’ car on se reconnait dedans, et je trouve ça intéressant que tu ai en quelque sorte ce rôle de « porte-parole ». En tant qu’artiste-interprète-compositeur-performeur, comment arrives-tu à condenser tout ça pour en faire un EP?
Ça fait neuf ans que je fais de la musique et je pense qu’au début on est un peu tous dans l’inspiration trop forte. Alors oui, on créer forcément, mais grâce à des accords et des mélodies qui existent déjà et qu’on rejoint. C’est intéressant de mentionner ça car, ça fait presque dix ans que je fais de la musique et on ne se rend pas forcément compte que ces années ont mené à cet EP ; tu le vois d’ailleurs sur les réseaux sociaux lorsqu’on te dit que tu es un « industry plant » alors que derrière tu joues depuis des années dans la rue.
Exactement, tout ne t’est pas du directement.
C’est ça et puis, ce n’est pas de la fausse modestie mais je trouve qu’il n’y a rien d’exceptionnel, c’est simplement pour dire que tous les chemins sont comme ça. L’industry plant ou un EP qui arrive de bout en blanc, ça n’existe pas : chacun a son parcours. Par exemple, ma gestuelle vient du fait que je ne sais pas danser – je me suis retrouvé avec un micro, j’ai bougé et le public a fait « ouah, c’est super », alors que j’étais simplement moi! Pour ce qui est des textes, étant un passionné de mots, et bien ce sont des heures d’écriture, de re-formulation de phrases, je retourne tout dans tous les sens et j’adore ça. Pour la musique, c’est pareil, rien n’était gagné. Là je me retrouve avec un projet que j’aime bien.
Ces années t’ont, finalement, permis de te trouver après un tas d’expérimentation.
‘Sam Sauvage’ c’est un EP à travers lequel je me dis que ça y est, j’ai trouvé une identité qui commence à éclore après avoir cherché longtemps. Et c’est exactement ça que je voulais.
Puisqu’on en parle, on comprend que tu es très observateur, que tu aimes regarder les gens et parler d’eux. D’où vient cette « passion »?
J’aime les gens *rires*. Certains artistes écrivent sur des paysages par exemple, mais moi je ne suis pas du tout observateur dans ces derniers, tout comme dans les détails ou les trucs importants, je ne les vois pas forcément. Je suis très peu sensible à la beauté esthétique des choses et je travaille là-dessus, mais concernant les gens c’est différent. C’est peut-être cliché mais, quand je m’installe à une terrasse et que j’entends un couple à côté, il y a forcément des choses qui ressortent. On peut penser que les gens sont tous pareils, métro-boulot-dodo, peut-être, mais ce qui est intéressant, c’est la manière de conter les choses. On vit tous à la fois des vies très différentes mais avec un socle commun qui ressemble à l’amour, le travail, la famille, le bonheur, la passion donc tout se rejoint mais, la façon de le raconter est très différente. Là, j’écris une chanson sur une rupture et ce n’est pas drôle si on dit simplement « il ne l’aime plus, ils se quittent », ce qui est intéressant c’est de raconter cette histoire avec ce qu’il y a autour d’eux. C’est ce que je fais dans ‘Ali roule de nuit’, parfois je prends mon point de vue mais pas trop, dans ‘Pas bourré’ j’utilise ‘je’ mais en fait ce n’est pas vraiment ‘je’, dans ‘La fin du monde’ je parle des jeunes… Les gens sont une grande inspiration, dont je fais moi-même partie.
Et justement, parlons de ces chansons.
Je vais essayer d’être bref car j’aime bien m’étaler quand j’en ai l’occasion *rires*.
‘Les gens qui dansent’ est le morceau dit hors format, c’est un des titres les moins écrits et qui ne raconte pas vraiment une histoire, bien que j’adore ça. Là, c’est une petite intro qui ne ressemble pas au reste de l’EP et surtout un morceau que je faisais en concert au début en totale improvisation avec le public. ‘Pas bourré’ parle d’alcool, certes, mais surtout de ressentiments dus à l’alcool. C’est quand tu es en lendemain de soirée que tu te rends compte qu’il se passe beaucoup de choses pendant cette période d’ébriété – on n’a heureusement pas besoin de boire pour grandir mais certaines situations font tout de même grandir. Donc cette chanson parle de ça, de l’ivresse générale de la jeunesse et aussi, un peu, de ces personnes qui ont besoin de boire pour tenir. ‘Dans le photomaton’ est la seule chanson d’amour que j’ai écrite qui finit bien, donc je me suis dit ‘celle-là, je la met!’ *rires*.
‘Les âmes sensibles’ est sur l’hypersensibilité de manière générale, sujet dont beaucoup de monde parle en ce moment. On entend souvent que tout le monde est hypersensible et je pense que oui, mais il y a des raisons à ça et ce n’est pas une honte, voilà pourquoi je voulais ouvrir ce sujet. ‘Ali roule de nuit’ est aussi ma préférée de l’EP maintenant. Au début, je ne savais pas quoi penser de ce morceau et finalement j’en suis assez content, surtout que c’est une histoire vraie, en étant dans un taxi et coincé dans les bouchons à 3H00 du matin. C’est un trajet qui m’a beaucoup inspiré donc j’ai écrit cette chanson directement en rentrant, un peu pour parler de ces rencontres improbables et héros discrets. Et le dernier morceau est ‘La fin du monde’ qui, à contrario de ce qu’on peut penser est un titre plein d’espoir. Je trouve qu’on est une jeunesse très critiquée alors qu’elle est formidable à tous points de vue, on montre souvent une jeunesse qui ne fait rien et qui se morfond, alors qu’il y a des choses qui bougent, des gens qui ont des projets sur le long terme… Donc c’est la fin d’un monde et l’ouverture d’un nouveau.
Quand on fait un bond dans l’ancien monde, c’est-à-dire ton passé, on peut voir que tu as fait des premières parties, pas mal de concerts…
Oui carrément, avec Maxime Le Forestier, Eddy de Pretto et quelques-unes avec Jimmy Somerville, c’était fou.
Comment on se retrouve à faire les premières parties de Jimmy Somerville?
Écoute, je jouais dans la rue à dix-sept ans, au fin fond de Boulogne-sur-Mer et un gars, Stéphane, vient me voir en me demandant si je voulais faire la première partie d’un petit chanteur anglais. J’accepte et deux mois après je me rends compte que c’est le programmateur d’un festival qui peut accueillir jusqu’à 3000 personnes, donc ouah. Somerville y jouait et j’ai donc fait sa première partie avec ma guitare…
Alors qu’à l’origine tu chantais tranquille dans un bar à Boulogne-sur-Mer.
Mais oui! J’avais attiré l’œil de personne sauf lui et du jour au lendemain je me suis retrouvé devant 2500 personnes. Là, ça a été un déclic pour moi car je me suis dit « si je peux faire ça, c’est que j’aime bien ça ».
Sans transition, directement dans le grand bain!
Oui… Et au final je me dis qu’il n’y a rien de mieux pour ne pas se poser de question. Bon, ce n’est quand-même pas pour autant que les Zénith d’Eddy de Pretto ne m’ont pas fait peur *rires*.
C’est marrant parce que tu fais un peu le yoyo entre les Zénith, tes dates au Pop up! du Label puis en fin d’année La Maroquinerie… Tu sais t’adapter ! *rires*
*rires* Et parfois on perd même un peu les repères sur scène! Moi j’adore courir comme un dingue sur scène, sur ‘La fin du monde’ j’adore sauter partout et… quand tu te retrouves dans une plus petite salle, tu essayes de faire pareil mais tu mets un coup dans un mur, tu te fais mal… Mais c’est ça qui est drôle, on ne s’ennuie pas et c’est une des raisons pour laquelle j’aimerais beaucoup faire ce métier longtemps.
Je te le souhaite! Là tu viens de faire six concerts au Pop Up! du Label, tu enchaines avec La Maroquinerie à la rentrée…
Oui, j’ai trop hâte, on sera quatre sur scène en octobre au lieu de deux au Pop Up!, et ça va être chouette – je trouve que ma musique est faite pour être jouée comme ça. C’est un rêve de gosse.
Sam Sauvage a récemment annoncé un concert à La Cigale pour le 31 mars 2026.
En attendant, il est à retrouver sur la route cet été Cabourg, Mainsquare, Francofolies de la Rochelle…
À ne surtout pas louper!

Un petit commentaire